Sur les traces françaises de Jamais plus Jamais

Sur les traces françaises de Jamais plus Jamais

Le célèbre « Bond pirate » – refusons le terme non-officiel qui rappelle que l’histoire est écrite par les vainqueurs, même quand il s’agit de l’histoire… du cinéma – a principalement été filmé aux Bahamas, en Angleterre et en France… Voilà un joli prélude à notre prochain numéro d’Archives 007. Les reporters de choc du Le Bond sont allés enquêter…

Par Eric Saussine

Alors que le concurrent Octopussy avait pris ses quartiers à Pinewood, la production décida de baser Jamais plus jamais aux studios de Elstree, également dans la banlieue de Londres. Le film a beau être une production américaine, principalement à travers son réalisateur, le talentueux et regretté Irvin Kershner, il se passe principalement en Europe, France et Angleterre. M envoie également Bond aux Bahamas. 007 poursuit Largo en Afrique et dans le golfe arabo-persique. Mais le continent africain est le seul sur lequel ne s’est pas déployée la production : Palmyra est représenté par la France et les Bahamas par les eaux du Golfe du Lion.

Entre autres lieux remarquables, le château de Lutton How sert d’extérieur à Shrublands, tandis que le duel vidéo entre Largo et Bond est filmé dans une pièce rococo du manoir de Waddesdon dans le Buckinghamshire, pas très loin de Pinewood.

Outre les intérieurs filmés à Elstree, dont les scènes d’action finales, toute la partie médiane du film se passe sur la Côte d’Azur, la French Riviera comme nos amis anglo-saxons se plaisent à l’appeler.

Bond est accueilli à l’aéroport de Nice par Felix Leiter (Bernie Casey) et Nicole, agent des services secrets français (Saskia Cohen Tanugi). L’aéroport refait à neuf est réputé comme l’un des fleurons des équipements de la Méditerranée.

007 se rend ensuite dans une villa située sur les hauteurs de Villefranche-sur-Mer, dans le quartier du Castellet, totalement privatisé. La cité fortifiée est très présente dans le film. Depuis la villa, Bond observe le Flying Saucer dans la rade de Villefranche.

Quelle ne fut pas notre surprise en visitant le fort d’Antibes d’apercevoir le navire de Largo amarré dans le port au justement nommé « Quai des Milliardaires ». A l’époque de Jamais plus jamais, il appartenait au non moins milliardaire saoudien marchand d’armes Adnan Khashoggi, ami du producteur Kevin McClory(cf. ci-dessous) qui le prêta son bateau sous condition d’anonymat. Khashoggi est remercié au générique à travers ses initiales « A.K. ». L’histoire dit que la production étant en retard, le navire dut quitter la rade alors que l’atterrissage en hélicoptère de Largo n’était pas encore en boite. Avec l’autorisation du capitaine, l’hélico de la production filma son approche du navire, et l’on fit croire à l’atterrissage de l’engin en filmant ailleurs Largo dans l’habitacle de l’engin.

Bond se rend ensuite au casino de Monte Carlo (renommé « Casino Royale » sur le carton d’information visible en haut des marches d’escalier). Le film y a filmé grâce aux relations mondaines du producteur Kevin McClory. Un tournage en douceur, contrairement à celui de GoldenEye douze ans plus tard, qui reste un souvenir amer pour les autorités monégasques. A l’issue de la partie de « Domination » (filmée elle dans un manoir anglais), Bond gagne le droit de danser le tango avec Domino (Kim Basinger). La piste de danse n’est autre que le grand atrium du casino qui donne d’un côté sur les salles de jeu, de l’autre sur l’opéra de Monte Carlo. Certains plans ont été tournés dans le bâtiment voisin, le célèbre Hôtel de Paris qui jouxte la place du casino.

Revenu à la villa, après avoir découvert le corps de Nicole, James prend en chasse son assassin. La spectaculaire poursuite à moto démarre au quartier du Castellet, se poursuit dans la ville voisine de Beaulieu-sur-Mer et sur la montée de Nice (la collision des deux voitures après le saut à moto), puis dans le tunnel de Menton à vingtaine de kilomètres de là pour s’achever  à… Villefranche-sur-Mer, au port de la Darse, contigu à la forteresse de Villefranche (Palmyra). Ce par un savant retour en arrière géographique dont le cinéma a le secret.

Bond enfile alors une tenue de plongée et se fait capturer à bord du Flying Saucer. On pourrait croire qu’alors s’en est fini de la Côte d’Azur. Loin s’en faut. La forteresse de Palmyra, censée être en Erythrée, est un assemblage des forts de Villefranche et d’Antibes. C’est sur le chemin de ronde de cette dernière que se déroule le gros de la fuite à cheval. Les murs extérieurs sont le plus souvent ceux de Villefranche, à l’exception d’une paire de peinture sur verre. La cour où Domino est retenue prisonnière est quant à lui l’accès maritime de la forteresse, juste muré pour le besoin du film par le décorateur Philip Harrison qui y ajoute une herse.

En franchissant la rade, on retrouve la Villa Ephrussi-de-Rothschild et ses superbes jardins. On peut admirer l’intérieur de la villa puisque c’est précisément là que Bond et Domino sont « invités » par Largo. Les extérieurs prévus au planning seront coupés au montage. L’artiste Lou Lichtenfield avait créé un superbe matte painting de la forteresse enfermant les jardins, mais Irvin Kershner, nous priva de cette magnifique vue.

Outre le retour de Sean Connery, qui fit du film un événement, ce sont indubitablement ces lieux magiques de la Côte d’Azur qui donnent encore à Jamais plus jamais le luxueux cachet que l’on associe au monde de James Bond.


La fabuleuse histoire du « Flying Saucer »

Le luxueux vaisseau de Largo a une tortueuse et fascinante histoire (mondaine). Ce yacht de 85.65 m a été construit en 1980 par le constructeur Benetti pour un coût d’environ 100 millions de dollars (aujourd’hui, il en coûterait le double). Il fut baptisé « Nabila » du nom de la fille du milliardaire saoudien Adnan Khashoggi, son propriétaire.

Trois ans après, c’est l’aventure Jamais plus jamais pour ce navire qui fait encore partie des 25 plus grands yachts du monde. Son nom dans le film, le « Flying Saucer » est la traduction anglaise de l’original italien de Fleming, « Disco Volante », nom respecté dans le film Opération Tonnerre de Terence Young.

Plus étrange, en 1989, il inspira au groupe Queen une chanson, « Khashoggi’s Ship ». En 1988, Khashoggi en difficulté financière vend le navire au sultan de Brunei, qui à son tour le cède au célèbre homme d’affaires Donald Trump. Ce grand mégalomane le rebaptisa « Trump Princess » et remplaça le H de la piste d’hélicoptère (que l’on voit dans le film) par un T géant !

Trump, lui-même en difficultés, vendit enfin le navire au prince saoudien Al-Waleed bin Talal en 1991. Aujourd’hui, le navire « Kingdom 5KR », du nom de la société financière du prince, la Kingdom Holding Company, associé à son chiffre fétiche, 5, et aux initiales des prénoms de ses enfants, K et R. Son port d’attache est toujours Antibes.

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