Interview exclusive avec Léa Seydoux
Léa Seydoux est détendue en arrivant au bar privé de l’hôtel Bristol. Quinze journalistes installés en demi-lune, l’atmosphère est chaleureuse. Elle nous raconte son arrivée sur le film, qui fut un processus long. Après avoir fait connaitre son intérêt, elle est appelée pour être auditionnée. L’actrice se montre très franche sur certains sujets, dont celui de l’obtention de son rôle.
« J’ai eu la mauvaise idée, avant le rendez-vous de prendre une petite bière. » Faute d’être détendue, comme elle le souhaitait, cela eut pour conséquence… l’oubli de son texte ! Léa demande alors à repasser son audition, ce qui lui est accordé. Son agent l’appelle ensuite, sous le sceau de la confidence, pour lui murmurer que Sam Mendes l’a appréciée. Finalement, elle rencontre deux fois le réalisateur à Londres avant de pouvoir poser les yeux sur le sésame, le document ultrasecret, le scénario, non sans avoir auparavant signé moult documents de confidentialité.
« J’ai dû attendre assez longtemps pour dire que j’avais le rôle. J’ai su que j’avais le rôle en avril, et on a fait la première conférence de presse en décembre. »
L’actrice est plutôt surprise d’avoir été choisie. « Je n’y croyais pas. Quand j’ai raté le casting, j’y croyais encore moins. Les metteurs en scène ont plutôt de l’imagination ! C’est vrai qu’en sortant de La vie d’Adèle, vous ne vous dîtes pas forcément que cette fille aux cheveux bleus sera James Bond girl. » (rires)
Bien que biberonnée aux films de princesse, la môme Seydoux a surtout été marquée par Casino Royale et n’a pu résister à l’appel de l’agent 007. « James Bond fait partie de l’inconscient collectif. Et c’est sympa de faire un film que les gens vont voir. » Elle dit ne pas vouloir se cloisonner dans les films d’auteurs ou les films de divertissement.
A la lecture du scénario, Léa est aussi agréablement surprise d’y trouver un rôle qui n’est pas celui d’une femme objet. Impression renforcée par une rencontre avec Carole Bouquet qui lui révèle avoir été peu intéressée par le scénario de Rien que pour vos yeux et avoue aurait préféré jouer le rôle Bond girl aujourd’hui.
Autre surprise, entendant « Madlyn » dans ses conversations avec l’équipe britannique, Léa ne se rend compte qu’après de la référence proustienne autour du nom de son personnage, Madeleine Swann. « Ce n’est pas un hasard. Les scénaristes sont des gens cultivés… c’est le passé qui ressurgit. D’ailleurs, c’est tout le thème du film, pour tous les personnages. » Et son personnage qu’elle décrit comme traumatisée par son passé, coincée entre femme enfant et adulte responsable, qui est dure mais qui a besoin d’être sauvée.
Puis viennent les craintes, le trac. Elle confie sans ambages son appréhension à tourner les scènes d’amour avec Daniel Craig. Sentant la pression, elle se demande si elle va réussir, et appréhende aussi la différence d’âge.
Cette fille a la grâce : elle porte son âme en bandoulière. Elle irradie littéralement.
Léa a apparemment aussi vaincu sa peur sur certaines scènes d’action. « Je devais sauter d’un immeuble de huit mètres, et ça, je l’ai vraiment fait. Je vous avoue que j’ai le vertige. Déjà, au deuxième étage, je ne me sens pas très bien (rires). Cela m’a fait très peur, mais je l’ai quand même fait. Je n’avais pas le choix ! Il y avait toute l’équipe qui attendait ! » Après quelques secondes d’hésitation, Daniel Craig l’a prise dans ses bras, et ils ont effectué le saut. « Même dans les bras de James Bond, j’avais peur ! » Et Léa de révéler que même Daniel Craig ne prend pas ces scènes de cascades à la légère, évoquant sa blessure au genou à laquelle elle a assisté lors de la scène de la bagarre dans le train. « Ce n’était pas du cinéma ! » (rires) D’ailleurs, elle ne tarit d’ailleurs pas d’éloges sur son partenaire : une vraie force de proposition sur le plateau, « qui a su apporter, à son personnage, beaucoup d’humanité. »
Pourtant, confie-t-elle, ce fut un tournage difficile car très technique et donc très répétitif. C’est assez complexe de reproduire le même jeu entre le plan large et les plans rapprochés sur de nombreuses prises. C’était un tournage physique, mais pas si fatiguant qu’on ne peut l’imaginer. « C’était physique mais quand vous êtes excitée par le projet, vous ressentez moins la fatigue… ou la douleur ! Puis j’adore tourner. Donc il n’y a pas de moment où j’ai envie de rentrer chez moi. »
Puis l’actrice a gagné de la confiance avec les années. Elle se sent donc à l’aise sur plateau. Si la scène est dure et émotionnelle, il lui suffit de se couper du monde et de se concentrer. « Mais ça ne marche pas tout le temps ! », dit-elle en riant. Même jouer en anglais n’est pas un obstacle pour elle. L’anglais, contrairement au français plus « plus claquant », est un langage fluide et qui semble adapté au cinéma, confie-telle.
Son nom flotte désormais pour un rôle de super héroïne, mais ce n’est pour l’instant qu’une rumeur : elle confirme n’avoir pas été contactée. Restant dans une candeur qui ferait frémir son agent, elle avoue d’ailleurs ne pas avoir de projet immédiat… Bond part avec Madeleine à la fin du film, ce qui appelle pour les journalistes la question d’une suite. « En Angleterre, beaucoup m’ont posé la question. Ils sont tous sûrs que je vais revenir dans le prochain. Mais je ne sais pas. Je n’ai pas eu pour le moment aucune offre. Mais si jamais on me demandait de le refaire, je le referais avec plaisir. »